Guillaume Arnault, se noyer dans le rôle

« Ce qu’on cherchait en moi, c’était de la violence instantanée, une espèce d’éclatement de colère qui part en un quart de seconde. Je pense que j’ai su montrer au réalisateur que je pouvais avoir ce truc à l’intérieur qui explose, et c’est ça qui lui a plu. Je suis un acteur qui ne respire pas forcement la rage, de prime abord. »

 

Pouvez-vous vous présenter ?

Je m’appelle Guillaume Arnault, j’ai vingt-huit ans, je suis acteur.

D’où venez-vous ? 

Mon papa était militaire, et on a beaucoup voyagé à travers la France : Tours, Belfort, la Bretagne, la banlieue parisienne… Je vis à Paris depuis une dizaine d’années. C’est là où j’ai vécu le plus longtemps dans ma vie. J’ai beaucoup aimé la Bretagne aussi, mais aujourd’hui je suis plus Parisien qu’autre chose.

Quand avez-vous commencé à jouer ?

Très tardivement : j’avais à peu près dix-sept ans, j’étais encore au lycée. Un voisin m’a inscrit dans une agence de pub qui s’appelle Nouvelle Ere, et j’ai commencé à passer des castings. 

Vous êtes ensuite entré au Cours Simon…

Je n’avais jamais fait de théâtre avant, c’est un peu par hasard que je me suis retrouvé là-bas. Je ne savais pas quoi faire après le lycée, j’avais plus ou moins en tête d’entrer dans l’armée, comme mon père et mon grand-père… Mais le Cours Simon a été une très belle option et je m’y suis vite senti bien.
En première année, on commence par travailler le théâtre classique et notre « emploi », le rôle qui nous correspond a priori. En deuxième année, on se met à travailler sur notre « contre-emploi ». On fait du théâtre moderne aussi, des trucs un peu différents. Et en troisième année, on prépare notre spectacle de fin d’études pour le Théâtre du Gymnase. C’est là qu’on attaque vraiment soit des rôles à contre-emploi, soit des rôles qui nous tiennent à cœur. Il y avait une scène de La Chatte sur un toit brûlant avec Paul Newman que j’aimais énormément – je ne l’ai pas assez bossée, malheureusement. Mais on se cherche et on essaie de se trouver avant la fin de ces trois années. 

 

Quelles ont été vos expériences les plus marquantes ?

Marseille, c’était ma première « grosse » expérience, avec des monstres de cinéma. Il y avait Gérard Depardieu, Benoît Magimel, Géraldine Pailhas ! Et tourner Madre, ça a été une expérience extraordinaire grâce à l’équipe espagnole. Le tournage s’est fait presque entièrement en plan-séquences, avec une focale très large. Ça m’a pris au cœur.

On ne vous voit pas au théâtre : est-ce un choix ?

Ce n’est pas un choix ; c’est peut-être de la peur. Ce serait avec plaisir que je me confronterais à l’expérience, mais je ne sais pas comment j’appréhenderais la répétition des représentations… Au cinéma, on peut filmer plusieurs fois. Sur un plateau, on va répéter des dizaines et des dizaines de fois le même texte, et il faut être juste à chaque fois. Je ne suis pas sûr d’avoir cette justesse-là, et c’est pour ça que je ne cherche pas encore de rôles de théâtre.

Quelle est votre routine journalière ? 

Je suis quelqu’un de très patient, de très calme. Je n’ai pas besoin de m’occuper pour me sentir vivre. J’aime beaucoup les jeux vidéo, je lis un peu, je regarde des films… Je fais beaucoup de sport aussi. Je viens chez Arkose (salle d’escalade parisienne, NDLR) plusieurs fois par semaine, quand mes doigts me le permettent, pour garder un rythme. Et je travaille parfois dans la restauration pour ne pas rester planté chez moi trop longtemps à jouer aux jeux vidéo : on peut devenir bête.

Votre auteur de théâtre favori ?

J’aime beaucoup Tennessee Williams : j’ai tout lu, j’ai adoré. C’est moderne, on a toujours l’impression de voir un film ! La manière dont il écrit, c’est une captation en fait…

 

guillaume arnault comédien hollington FW20

Quels sont les acteurs que vous admirez ? 

J’ai énormément d’admiration pour Depardieu. J’aime beaucoup Paul Newman aussi, et Robert De Niro… Je ne connais pas leur filmographie par cœur, mais ils savent transmettre, on ressent des choses, on les voit évoluer et c’est extraordinaire. Les écoles, c’est super pour apprendre la base, la technique. Mais c’est sur un plateau qu’on voit la différence. J’ai adoré observer Depardieu : la manière dont il se place, comment il dit son texte, sur quelle réplique il rebondit, comment il tourne par rapport à la lumière. Il y a quelque chose d’instinctif qui se fait avec le temps, quelque chose qui était déjà là au départ sans doute, mais qui est exacerbé par le travail. Regarder des gens comme lui, c’est de l’information en permanence. C’est incroyable à appréhender, pour un jeune comédien. Tu es là et tu veux tout copier, mais tu es obligé d’adapter ce que tu vois à ta personne.

Avec quel réalisateur aimeriez-vous travailler ?

C’est une question très difficile. En vrai, j’aimerais travailler avec Yvan Georges-Dit-Soudril. C’est un ami avec qui j’ai fait mon premier court-métrage professionnel. C’est lui qui m’a révélé à moi-même quand j’étais encore au Cours. On a un projet de long métrage, Déjà loin, et j’espère qu’il va se faire. Julien Graber, c’est aussi un ami avec qui j’adore travailler. On a beaucoup aimé tourner Cimer, et un long court-métrage qui s’appelle Hors Jeu. Avec lui, ce sont à chaque fois de très bonnes expériences, des personnages un peu compliqués à travailler. Il me connaît très bien, il essaie de me sortir de la bulle dans laquelle je m’enferme et c’est vraiment intéressant. Il me connaît trop pour me laisser me mettre dans mon petit coin tranquille. Il essaie vraiment de s’épanouir lui et de m’épanouir moi à travers ses films et ça, c’est très agréable.

Quel rôle rêveriez-vous d’incarner ?

Je fais souvent des méchants avec un bon fond qui sont un peu pourris de l’intérieur, qui ruminent de la rage depuis des années et des années. Alors j’aimerais bien faire de la comédie. Je n’ai pas forcément ce rythme comique, et j’aimerais bien l’apprendre.

Quels ont été les effets du confinement sur vous ?

Ça s’est très bien passé, dans l’ensemble. Ma petite amie était à la maison. On a pu s’occuper du chaton qu’on venait d’adopter, se recentrer, se retrouver tous les deux. J’ai aussi passé beaucoup de temps sur les jeux vidéo pour m’évader un peu de l’appartement. C’était assez particulier d’être à Paris et d’entendre les oiseaux mais pas les voitures, de ne plus entendre ce bruit permanent. 

 

guillaume arnault comédien hollington FW20

Quels sont vos projets ?

Le principal c’est Déjà loin, dont je parlais tout à l’heure. Je passe beaucoup d’essais en ce moment pour des séries, pour des films. Mais j’attends avant de parler, parce que tout peut vriller en un claquement de doigts, être annulé parce que le décor n’est plus disponible. Ou tu es validé sur un casting mais ton « papa » n’est plus disponible, on va changer l’acteur principal et, du coup, tu ne corresponds plus au profil, etc. Il faut rester pragmatique, avoir beaucoup de patience et ne rien prendre personnellement. Tu peux travailler ton casting le mieux du monde et ne pas être pris parce que tu es blond, que tu n’as pas la bonne taille, parce que ton « père » et ta « mère » ont les yeux bleus et pas toi… Il faut réussir à mettre ça de côté, se dire « moi, mon travail c’est de connaître mon texte et d’avoir travaillé sur ça, ça et ça. Ce qui se passe derrière, ce n’est plus de mon ressort, on verra. » Remettre le choix à quelqu’un d’autre est difficile parce qu’on a envie de contrôler ce qui se passe dans nos vies. Dans ce métier, on prend quand même énormément de bâches, et ça peut être difficile à encaisser. C’est comme ça que ça se passe de toute façon, il faut persévérer. Pour Madre, j’ai rencontré le réalisateur, Rodrigo Sorogoyen et l’actrice principale, Marta Nieto. Il y avait eu un premier casting avant. Ce qu’on cherchait en moi pour ce personnage-là, c’était de la violence instantanée, une espèce d’éclatement de colère qui part en un quart de seconde. Je pense que j’ai su montrer au réalisateur que je pouvais avoir ce truc à l’intérieur qui explose, et c’est ça qui lui a plu – je ne suis pas un acteur qui respire forcément la rage, de prime abord.

Quelle est l’importance du costume, selon vous ?

Le costume est une demande du réalisateur. Il « voit » son personnage et crée son look avec la cheffe costumière. Par rapport à tel profil psychologique, elle va plutôt – ou il va plutôt, d’ailleurs, il faut que je sois plus inclusif. Donc ils vont choisir un type de fringues qu’on va porter pour rentrer dans le personnage. Après, on peut y apporter une petite touche perso, dire « je pense que je serais mieux dans cette tenue-là que dans celle-là ». Ça permet de changer de peau. Si je joue un avocat, je suis plus à l’aise dans un super costard : je m’y noie, j’ai une tenue, une rigueur que je n’ai pas quand je joue une racaille et que je porte des TN ou des Reebok, dans des fringues un peu street. Le costume apporte à la crédibilité que tu te donnes à toi-même et ça, ça ne marche pas mal.

Au quotidien, quelle place donnez-vous aux vêtements ?

J’accorde beaucoup d’importance à mes fringues, mais j’en ai très peu. Je ne suis pas très matérialiste. Il y en a que j’aime beaucoup et j’en prends soin. Je suis très maladroit, alors je les garde pour des occasions. Je les adore, mais je ne pourrais pas me balader en costume tous les jours. J’ai deux jeans, huit T-shirts, quatre chemises, deux vestes, et une paire de chaussures.

Votre couleur préférée?

Le bleu, le bleu-vert. J’ai entendu qu’au théâtre le vert porte malheur, c’est sans doute pour ça que je n’en fais pas (rires). Mais ca fait ressortir mes yeux, j’en profite.

Comment avez-vous connu hollington ?

J’ai connu hollington il y a deux ans, en posant pour la marque. Et j’ai découvert les fringues : quand on les porte, elles donnent une prestance, un charisme, quelque chose en plus. C’est un peu comme ce qu’on disait pour un rôle : tu te sens bien dans la fringue, en fait. Une jolie chemise, un col mao, les pantalons en lin, ma veste – c’était une chemise mais j’ai fini par la porter en veste tous les jours, l’été dernier. Tous ces petits trucs-là, chez hollington, on se les approprie forcément.

Qu’est ce que vous préférez : la forme ou les matières ?

Je peux prendre les deux ? Je dirai la matière. Et la forme, impeccable, super bien taillée. J’ai de gros bras, mais je ne me sens pas comprimé. Je suis à l’aise, les épaules sont parfaites. Et vous avez la chance d’avoir un monsieur qui fait des retouches extraordinaires, Kumar. Kumar est ouf.

Dans quel rôle vous imaginez-vous quand vous portez un vêtement hollington ?

Le costume gris, ou le pourpre et bleu, je me vois en parrain de la mafia, vraiment. Je suis hyper bien dedans, et ça a une gueule extraordinaire. Celui en velours aussi. Le Parrain, oui. Peaky Blinders même, pour le costume trois-pièces : une montre à gousset, et ça y est t’es parti.

 

 

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Nous remercions chaleureusement Guillaume Arnault pour son accueil et le temps qu’il nous a si gentiment accordé.

Photos : Clément Vayssieres @clement.vayssieres